Le concepteur et les matériaux. Éléments de réflexion pour une reconfiguration des circuits de l’économie matérielle par les pratiques architecturales contemporaines.



Cette recherche s’intéresse aux matériaux de construction et aux architectes. Elle explore les circuits le long desquels circulent les matériaux et étudie les dispositifs dont ils sont munis pour rendre cette circulation possible. Elle se penche sur les rôles que jouent et sur ceux que pourraient jouer les concepteurs au sein de ces circuits et en regard de ces dispositifs.

Ce travail s’inscrit dans le cadre d’une réflexion sur les pratiques de l’aménagement de l’espace bâti. Au cours de son trajet entre son site de production et celui de sa mise en œuvre (c’est-à-dire le chantier de construction) – et même au-delà, lorsqu’une transformation libère des éléments constructifs – un matériau passe par de nombreuses étapes. Parmi toutes celles-ci, le passage par le moment de la conception est un élément central de cette recherche (même si d’autres étapes sont également abordées au fil de pages de ce travail). Quels rôles les concepteurs jouent-ils au sein de ces vastes assemblages d’acteurs et de dispositifs qui se déploient le long des trajectoires des matériaux de construction ? Comment les concepteurs sont-ils affectés par ces assemblages et comment peuvent-ils les affecter en retour ?

Répondre à ces questions engage une exploration des principales trajectoires des matériaux de construction et un examen attentif des dispositifs dont ils sont munis au fil de ce processus. C’est ce à quoi s’attache la première partie de cette recherche, dont la portée est plutôt descriptive. Mais elle ne s’arrête pas à ce stade. Elle comporte également une seconde partie, plus prospective et critique. Cette recherche propose en effet d’explorer certaines pistes de reconfiguration au sein de ces assemblages. Elle examine plusieurs questions touchant aux limites des circuits de l’économie matérielle : par quelles modifications faudrait-il en passer pour que des matériaux actuellement exclus des circuits les plus courants de l’économie matérielle puissent malgré tout y circuler ? D’autres arrière-plans axiologiques pourraient-ils être mis en jeu dans les circuits de l’économie matérielle ? De quelle façon la responsabilité des différents acteurs concernés se décline-t-elle alors précisément que les vastes réseaux d’action tendent à diluer les principes responsabilisants ?

La présente recherche repose sur l’hypothèse que les concepteurs peuvent effectivement contribuer à la transformation progressive des circuits de l’économie matérielle. Ils ont vraisemblablement un rôle à jouer dans la possibilité d’ouvrir ces circuits à de nouveaux matériaux, et de contribuer ainsi à établir des pratiques plus à même de répondre aux enjeux écologiques et politiques auxquels sont confrontés notre planète et ses habitants. Bien sûr, les concepteurs n’ont pas l’exclusivité de tels changements. D’autres acteurs peuvent, et même doivent, participer à de tels efforts. Ce sont pourtant principalement les concepteurs qui retiennent l’attention de cette recherche. Il s’agit dans ce cadre d’explorer les conditions d’un tel changement, et ce tant d’un point de vue méthodologique que d’un point de vue pratique.

—–

La thèse a été défendue publiquement le 12 septembre 2014.

Membres du jury : Jean-François Côté (UQAM), Doina Petrescu (Sheffield School of Architecture), Marcelle Stroobants (ULB), Lionel Devlieger (Rotor), Judith le Maire (ULB), Jean-Louis Genard.