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Espaces autres et sexualités parias

En matière de recherches associant gender studies et architecture, rares sont celles qui ont intégré dans leurs préoccupations les évolutions les plus récentes de la queer theory et la distance critique que celle-ci oppose à l’égard des normes qui régulent le conformisme social et culturel. L’architecture et l’espace conçu participent pourtant de celui-ci autant qu’ils tendent globalement à le représenter. Si les écrits de la philosophe Beatriz Preciado pourraient être considérés, à de multiples égards, comme exemplaires d’une ouverture pour l’architecture à ces (re)positionnements politiques et épistémologiques, force est de reconnaître parallèlement que les pistes offertes par ses propositions n’ont pas encore été exploitées.

La présente recherche entend envisager la pornotopie (B. Preciado 2004, 2011) – ou plus spécifiquement les questions que ses définitions et sa topologie soulèvent – comme prétexte heuristique capable de renouveler notre regard sur les rapports qu’entretient l’architecture (entre autres dans son acception spatiale, mais aussi objectuelle, sociale, culturelle, représentationnelle) avec la sexualité, le genre, ou la fabrication des subjectivités sexuelles, à la lumière de ce que la théorie queer pourrait faire à cette discipline, de ce que les pratiques sexuées troubles et parias font à l’espace et, inversement, de ce que les lieux font aux pratiques sexuelles, sexualisées, genrées considérées comme étranges ou « déviantes » (H. Becker 1985).